Je viens de lire, dès potron minet, la réponse de Monsieur D. à l’opération Lobbying. Autant le dire tout de suite, je la trouve fort bien faite et elle ne me surprend pas le moins du monde. C’est même le contraire qui m’aurait étonné et je pense qu’il serait dommage de verser dans un pessimisme sans fond et tirer le rideau sur une opération Lobbying  particulièrement intéressante et novatrice dans notre microcosme. Pour le moment du moins…

 

Regardons plutôt d’un peu plus près les réponses qui nous sont faites :

1) La faiblesse du radioamateurisme français n’est pas un cas isolé

De façon synthétique, cette faiblesse découlerait directement :

– Du phénomène « internet » qui est d’ailleurs l’argument « massue » avancé par à peu près tout le monde. De fait, cette réponse ne peut que faire consensus même si elle mériterait une analyse plus précise.

– Du caractère plus sélectif de l’examen en France. Cette « faiblesse » avouée est en fait présentée comme une force, du genre « les radioamateurs français sont moins nombreux ici mais de meilleure qualité ».

– Du fait que plusieurs indicatifs sont attribués à une même personne dans certains pays. La formulation laisse à penser que cette pratique est assez répandue en europe… mais pas en France.

Pour résumer, la position de Monsieur D. pourrait se résumer ainsi :

Les radioamateurs français sont de meilleure qualité qu’ailleurs, peu nombreux du fait de l’intérêt croissant pour le net, et on aurait le même constat dans les autres pays si ces derniers n’attribuaient pas plusieurs indicatifs pour une même personne. Autrement dit, le radioamateurisme national est le véritable reflet de cette activité.

2) L’administration française respecte à la lettre la réglementation internationale

Point besoin de résumer, vous connaissez tous ça ! De toute façon, Monsieur D. n’allait pas dire le contraire …

3) La responsabilité de la situation incombe plutôt aux associations représentatives

Là, Monsieur D. met en évidence deux exemples :

« l’administration a proposé, début 2009, la possibilité de réattribuer aux radioamateurs ayant une certaine ancienneté les indicatifs courts (à 2 lettres au suffixe au lieu de 3), ce que les associations ont refusé« . Sans commentaire sinon que les vieux birbes du REF-u ont une nouvelle fois perdu une bonne occasion de se taire.

« Ce cadre juridique a été validé à plusieurs reprises par le Conseil d’État, saisi au contentieux par des radioamateurs« .  Sans commentaire non plus si ce n’est que les rois de la saisine auraient été mieux inspirés d’aller à la pêche…

4) L’administration a fait de nombreux efforts en faveur des radioamateurs français

Plusieurs éléments sont avancés et représentent le corps central de la contre offensive :

– Mise en œuvre d’une application internet pour le passage des examens

– Gel du montant de la taxe depuis plusieurs années – alors que c’est beaucoup plus cher ailleurs… enfin, chez les DL et les PA.

– Mise ne place d’une classe novice. On passera pudiquement sur les problèmes de réciprocité et sur la faible attractivité de cette classe novice du fait du peu de droits qu’elle confère.

– La bande de 7100 kHz à 7200 kHz a été récemment attribuée par l’ARCEP aux radioamateurs. Cette formulation ne précise bien entendu pas que cette attribution s’est faite des années lumières après le reste du monde…

– « C’est pourquoi la France vient de déposer une proposition au niveau européen, dans le cadre de la préparation à la prochaine conférence mondiale des radiocommunications de 2012, pour que soit attribuée aux radioamateurs tournés vers les expérimentations la bande de fréquences 461 à 469 kHz« . Voilà qui est très généreux même si cette initiative ne concernera qu’un tout petit nombre de passionnés alors que le plus grand nombre aimerait plutôt qu’on parle du 50 Mhz…

5) Un point de divergence : les interconnections avec le net

« L’ARCEP estime que cette utilisation sortirait du périmètre expérimental, présenterait des risques en termes de sécurité publique et n’est pas conforme au cadre réglementaire tant national qu’international« .

Voilà un des points de faiblesse de la contre offensive tutélaire, et il tient dans le mot « estime« … Ici, Monsieur D. reconnaît qu’il n’y a pas d’élément imparable pour appuyer sa position et, d’une certaine façon, entrouvre une porte au champ de la négociation qui, heureux hasard, va se tenir de façon imminente sur le sujet ! La vie est bien faite, non ?

Je n’irai pas plus loin dans l’étude de cette réponse si ce n’est en indiquant qu’elle utilise toutes les bonnes vieilles ficelles du style :

– Report de la charge des problèmes sur quelqu’un d’autre (Le REF-u pour l’essentiel)

– Mettre en exergue certaines initiatives (genre le 461 Khz) pour ne pas parler de ce qui est réellement demandé (50Mhz, 1.6 Mhz…) par le plus grand nombre.

– Entrouvrir la porte d’une possibilité de négociation.

Pas de surprise donc, dans cette réponse administrativement fort bien faite, je le répète.

Et maintenant ? Certains gars à courte vue vont gloser sur le fait que nous nous le sommes fait mettre bien profond une nouvelle fois. Mais à quoi s’attendaient-ils donc ? Espéraient-ils que Monsieur D. allait faire à genoux le tour de son ministère en psalmodiant « c’est ma faute, c’est ma très grande faute… » ? Et bien, ça ne vous étonnera sans doute pas, mais je ne suis pas du tout d’accord avec l’analyse de ces gars plus prompts à manier le ricanement que la proposition. Bien au contraire ! Car cette opération « Lobbying » n’était pas une fin en soit mais, au contraire, le coup de starter d’une potentielle nouvelle relation tutelle / associations.

Comme dans toute relation de rapport de force, la tutelle à montré son pouvoir et son habileté face à des  radioamateurs qui font montre, pour leur part,  d’une détermination assez nouvelle. Le décor est donc planté et la négociation va pouvoir commencer sur de nouvelles bases.

Bien sûr, le REF-u va devoir régler urgemment ses problèmes internes pour gagner en crédibilité face à un Monsieur D. (terme générique que j’utilise pour présenter la tutelle au sens large et non la seule personne qu’il identifie) mécontent mais prêt à discuter.

Bien sûr, le résultat des courses sera affaire de compromis, il serait utopique de tout vouloir tout de suite. Il sera par ailleurs impératif que toutes les associations se coordonnent en amont pour présenter des dossiers cohérents, partagés et argumentés.

En tout état de cause, les suites et annonces qui seront faites à l’issue de la réunion imminente de concertation sur les modes numériques, vont donner le ton des futures relations avec la tutelle. Je croise donc les doigts…

Enfin, une dernière chose me paraît importante : il serait bon que chaque ED, lorsqu’il recevra de ses élus la réponse de l’administration, fasse un courrier de remerciement (peut être que F6FRA, ou d’autres, proposeront un modèle type ?) aux dits élus. En effet, un premier contact s’est établi avec des personnalités qui, pour la plupart d’entre elles, entendaient parler pour la première fois de radioamateurisme. Il serait donc de bonne politique que de cultiver cette relation en montrant d’emblée que nous sommes des gens polis et responsables qui savent dire merci lorsque la démarche sollicitée a été effectuée. Qui sait d’ailleurs si, à l’avenir, les radioamateurs n’auront pas besoin de solliciter à nouveau l’intervention de leurs élus, ne serais-ce que pour des problématiques locales ?

Wait and see, donc…